L'herméneutique théologique de Karl Barth : Exégèse et dogmatique dans le quatrième volume de la Kirchliche Dogmatik

(fre) L’œuvre de Karl Barth élève une protestation claire et puissante à l’encontre du cloisonnement entre exégèse et dogmatique dont la pratique théologique actuelle semble trop souvent s’accommoder. Au seuil de la réflexion dogmatique, Barth tient la confrontation avec la Parole de Dieu attestée dans les Écritures pour un moment incontournable. L’instance exégétique, reconnue dans son autonomie et sa logique spécifiques, est comprise comme une présupposition nécessaire à l’élaboration et à l’expression de la pensée dogmatique. L’horizon de la Parole n’est pas délaissé tandis que la foi se met en quête de son intelligence. Chacune des disciplines, exégèse et dogmatique, obéit à une logique qui lui est propre ; pourtant ces logiques ne demeurent pas extérieures l’une à l’autre. Les niveaux de discours ne se confondent pas ; et cependant ils ne peuvent se déployer indépendamment l’un de l’autre. Ces deux dimensions de la compréhension théologique, pour distinctes qu’elles soient, s’articulent intimement l’une à l’autre et se déterminent l’une l’autre. Concernant la pertinence herméneutique de la théo-logique élaborée par Karl Barth, il faut souligner tant son rôle historique que son actualité théologique. A la recherche d’une voie authentiquement théologique, Barth est impliqué de facto dans une recherche d’ordre herméneutique visant à reconquérir par une relecture des exigences de la conscience historique toutes les dimensions de la compréhension. La “critique” de la théo-logique de Barth s’entend précisément ici d’une adéquation de la démarche théologique à l’objet qui la met en mouvement. La question est de savoir si la pensée, répondant à l’impulsion de la fides quaerens intellectum, correspond à la “crise” qui lui vient de cet objet. En parlant de “vigueur de la critique”, on désigne ainsi la radicalité avec laquelle la raison se met en quête de la manière idoine de poser la question de la vérité. Le déploiement dialectique de la pensée suit-il pas à pas la dialectique interne de la chose (die innere Dialektik der Sache)? En ce sens, la théologie barthienne soutient la comparaison avec la theologia crucis du jeune Luther.