Philippe, Denis
[UCL]
Une personne dépose son véhicule chez le garagiste; elle y laisse des bijoux dans le coffre, sans en avoir averti le garagiste. Celui-ci laisse négligemment la voiture non gardée à l’extérieur durant la nuit. Le véhicule est volé. Le garagiste doit-il indemniser, outre la valeur du véhicule, celle des bijoux?
C’est la problématique du dommage indirect et imprévisible, abordée dans le présent article qui n’est pas sans intérêt pratique; nombreuses sont en effet les clauses qui excluent de l’indemnisation du dommage indirect et imprévisible, si bien que l’appréhension de ces notions est fort importante. Après avoir décrit la typologie de ces clauses, l’article se penche sur la définition de ces notions et de leur rapport avec des notions proches comme l’imprévision ou la causalité adéquate. L’article s’attache ensuite au régime juridique de ces concepts en droit belge et français tout d’abord. Ces deux systèmes juridiques excluent, en matière contractuelle, l’indemnisation des dommages indirects et imprévisibles sur la base des articles 1150 et 1151 du Code civil. L’on constate que, par une interprétation restrictive de ces notions, le droit belge permet une indemnisation plus étendue que le droit français. Ainsi, en droit belge, dans le cas cité plus haut, l’indemnisation des bijoux pourrait être allouée à l’inverse du droit français.
Le droit anglais refuse l’indemnisation du dommage qui est trop éloigné (remoteness of damage) et donc également l’indemnisation des bijoux. Le droit allemand aboutira à une solution similaire sur la base de la causalité adéquate. Les instruments internationaux (CVIM, principes Unidroit, Cadre commun de référence) excluent l’indemnisation du dommage imprévisible, donc en l’espèce l’indemnisation des bijoux. Ainsi, dans la plupart des systèmes juridiques (à l’exception sans doute du droit belge), la communication du dommage potentiel est primordiale et conditionne la prévisibilité du dommage. L’article montre aussi la pertinence de la distinction entre le régime de la responsabilité contractuelle et quasi-délictuelle; en effet, dans le premier cas, la communication du risque et l’économie contractuelle déterminent le dommage imprévisible tandis que ce critère est par nature absent en matière quasi-délictuelle.
Bibliographic reference |
Philippe, Denis. A propos du dommage indirect et imprévisible et des clauses s'y rapportant. In: Revue de droit international et de droit comparé, , no. 4, p. 497-544 (2010) |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/110494 |