Pirovano, Flavia
[UCL]
Dupuis, Michel
[UCL]
Depuis une vingtaine d’années, le projet a pris une place toujours plus grande dans la manière de soigner les patients psychiatriques : à leur entrée dans l’institution, ils se doivent de décider d’un but à atteindre avant de quitter l’hôpital. Cependant, cette méthodologie semble ne pas marcher à tous les coups : de nombreux patients n’arrivent pas à trouver un projet, ou à s’y tenir. Dès lors, nous nous interrogeons sur les raisons de cet échec : est-ce une question de manque de volonté, ou y a-t-il un élément qui pourrait nous permettre de mieux cerner le problème ? Cet élément semble être la temporalité, ou plutôt le conflit entre les temporalités qui structurent notre existence. En effet, nous postulons trois temporalités : la temporalité de la société, marquée par l’instantanéité, la temporalité de l’institution dans laquelle le patient est soigné et la temporalité de la maladie. La temporalité de l’instantanéité sera expliquée à l’aide des travaux de Stanghellini et Muscelli à travers leur analyse de l’instantanéité comme toile. Pour montrer la temporalité de l’institution et de la maladie nous utiliserons Minkowski et son concept de temps vécu, Binswanger et son étude de la manie et de la mélancolie, ainsi que Blankenburg avec la perte de l’évidence naturelle. Enfin, nous utiliserons Marquis pour comprendre les logiques sociales derrière le projet. Ces trois temporalités entrent en conflit, et empêchent le patient de se projeter, élément pourtant essentiel à la réussite du projet. La temporalité de la société, instantanée, prétend à l’hégémonie de l’instant de par sa structure en toile, où l’instant surgit sans cesse, en mettant à mal le passé et le futur. La temporalité de l’institution est plutôt dans une optique de l’accélération, c’est-à-dire une temporalité linéaire, futuriste. La temporalité de la maladie est influencée par celle-ci, et dépend donc des symptômes propres à la maladie. Schizophrénie pauci-symptomatique, mélancolie ou manie : chaque maladie a sa propre temporalité, qui peut s’axer soit sur un passé trop envahissant, soit sur un futur fermé, soit sur une impossibilité de former un monde commun. Les trois temporalités se focalisent sur des éléments différents, il est dès lors difficile de les combiner, et de faire place à certains idéaux tels que l’autonomie, qui sont pourtant nécessaires à la réalisation du projet.


Référence bibliographique |
Pirovano, Flavia. De l'influence des conflits de temporalité dans la prise en charge psychiatrique : la difficulté de généraliser l'approche par projet. Faculté de philosophie, arts et lettres, Université catholique de Louvain, 2018. Prom. : Dupuis, Michel. |
Permalien |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:14265 |