L'influence d'une double tâche motrice sur la perception de l'espace et des actions d'autrui

Dans la littérature, il est démontré que notre perception peut être influencée par les propriétés de notre corps et nos représentations motrices. C’est le cas notamment pour les tâches de jugement d’atteinte et d’estimation de distances. Il est également démontré que, puisque ces tâches nécessitent certaines ressources motrices, l’exécution simultanée d’une action vient perturber les performances à ces tâches perceptives. Nous désirons remarquer si cette observation est également valable lorsqu’il s’agit de la perception de l’espace d’une tierce personne. Plus encore, nous tentons d’observer si la réalisation simultanée d’une action perturbe nos performances aux tâches de jugement d’atteinte envers une tierce personne ; d’estimation de distances égocentriques envers une tierce personne ; d’estimation de distances allocentriques. Pour tester cette hypothèse, nous avons demandé à seize participants de répondre à ces trois tâches, soit en effectuant une double tâche motrice, soit un restant les mains sur les genoux. Lors de la tâche de jugement d’atteinte envers une tierce personne, les participants doivent évaluer si la tierce personne est capable d’atteindre un objet placé devant elle. Pour les deux autres tâches, les participants doivent estimer en centimètres la distance séparant un objet de la tierce personne (égocentrique), ou d’un autre objet similaire (allocentrique). Nos résultats révèlent un effet de la double tâche motrice sur les temps de réaction des participants à la tâche de jugement d’atteinte. Plus concrètement, l’exécution de la double tâche motrice amène les participants à répondre moins vite à cette tâche. La double tâche motrice ne montre cependant pas d’influence sur les deux tâches d’estimation de distances, que celles-ci soient égocentriques ou allocentriques. Ce dernier résultat suggère que ces tâches ne requièrent pas de ressources motrices dans leur évaluation. La double tâche motrice ne montre également aucun impact sur la précision des évaluations des participants aux trois tâches. Notre étude indique donc que l’exécution d’une action simultanée influence notre perception de l’espace d’autrui, suggérant l’implication de certain processus moteur dans cette perception. Cependant, nos procédés évaluatifs semblent s’avérer différents en ce qui concerne la perception de notre espace et celui d’autrui.