Vertongen, Youri
[USL-B]
La présente thèse a pour objet la mobilisation sociale en faveur de la régularisation des « sans-papiers » qui s’est déroulée en Belgique sous la législature du gouvernement fédéral Michel I et II entre 2014 et 2020. Elle rencontre deux objectifs : d’une part, analyser les modalités de constitution et d’organisation du collectif nommé la Coordination des sans-papiers de Belgique, d’autre part, étudier la nature des relations qu’entretiennent ce collectif et les acteurs solidaires de la société civile au sein d’une coalition hybride nommée la Plateforme associative autour du combat des sans-papiers. Privilégiant une entrée par les acteurs, cette thèse se concentre sur l’analyse micropolitique de l’ordre local de la mobilisation, et non sur son impact en termes de politique publique. Cette démarche consiste à élucider le fait que les sans-papiers se mobilisent dans l’espace public en exploitant un certain nombre de ressources (« théorie de la mobilisation des ressources »), en bénéficiant d’opportunités contextuelles (« structure d’opportunités politiques ») et en déployant des discours qui trouvent une résonnance dans un cadre sociopolitique spécifique (« théorie des cadrages »). En exploitant un important matériel empirique récolté grâce au recours de trois outils méthodologiques (l’observation participante, l’analyse du contenu de la littérature grise et la réalisation de 50 entretiens avec les acteurs du terrain), cette thèse dévoile ainsi le potentiel des acteurs « sans-papiers » à déjouer certaines des contraintes qui se dressent sur leur parcours pour en faire des ressorts de leur stratégie militante. Elle met également en exergue la coexistence de deux logiques complémentaires sur lesquelles se greffe leur mobilisation. D’une part, une logique propre aux « sans-papiers » visant à valoriser leur présence sur le territoire et nécessitant de développer leurs propres arguments au nom desquels il est légitime de les régulariser. D’autre part, la logique des acteurs solidaires des « sans-papiers » à laquelle ces derniers doivent sans cesse s’adapter afin de bénéficier de leur soutien politique. Or, cet impératif d’adaptation est à l’origine d’une série de dissonances qui génèrent méfiance et conflit entre ces deux types d’acteurs et fait apparaître un champ de mobilisation régulièrement source de tensions. Ceci participe à ce que les « sans-papiers » élaborent des revendications d’autonomie vis-à-vis de leurs soutiens extérieurs. Cette étude révèle in fine que les migrants en situation administrative précaire doivent, lorsqu’ils s’engagent dans une mobilisation collective, relever de nombreux défis qui confrontent leur logique propre à celles des acteurs avec lesquels ils sont en interaction.


Bibliographic reference |
Vertongen, Youri. Pratiques collectives au sein de la mobilisation en faveur de la régularisation des sans-papiers en Belgique (2014-2020). Tactiques, autonomie et articulations entre acteurs avec et sans-papiers.. Prom. : Duez, Denis |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.3/261862 |