Nyssen-Behets, Catherine
[UCL]
L’amélioration des conditions socio-économiques a considérablement accru l’espérance de vie tout en favorisant le développement de troubles dits dégénératifs. Le squelette est un des systèmes sur lesquels les années pèsent le plus lourdement. Ainsi, entre 20 et 80 ans, l’ostéopénie physiologique (Pommer, 1925 ; Amprino et Bairati, 1936) est estimée à 27% chez l’homme et à 40% chez la femme, la ménopause produisant une accélération de la raréfaction osseuse entre 55 et 65 ans (Courpon et coll., 1973 ; Meunier, 1986 ; Riggs et Melton, 1986).
Quad l’ostéopénie s’aggrave au point d’entraîner un risque accru d fracture, même après un traumatisme mineur, elle est considérée comme une maladie, l’ostéoporose d’involution (Meuner, 1986 ; Riggs et Melton, 1986 ; Melton et coll., 1988). Ce syndrome se manifeste sous deux formes.
Le type I, ou postménopausique (Riggs et coll., 1983 ; Riggs, 1987), est attribué au déficit en œstrogènes. Il est caractérisé par une destruction accélérée et disproportionnée de tissu osseux spongieux. Les tassements vertébraux en sont la conséquence clinique. Il en découle une réduction de la sécrétion d’hormone parathyroïdienne, de la production de dihydroxycholécalciférol et, de ce fiat, de l’absorption du calcium (Heaney et coll., 1982 ; Riggs et coll., 1983).
L’ostéoporose de type II ou sénile, uniquement due à l’âge, mène à une déplétion équivalente de l’os spongieux et de l’os cortical et frappe particulièrement le col fémoral (Riggs, et coll., 1983 ; Riggs et Melton, 1986). Elle est attribuée non seulement à une réduction de l’activité ostéoblastique (Lips et coll., 1978) mais aussi une diminution de la disponibilité de la vitamine D (Gallagher et coll., 1979), ce qui contribue à une absorption moins efficace du calcium (Nordin, 1960 ; Bullamore et coll., 1970) et entraîne une riposte sécrétoire de parathormone (Wiske et coll., 1979 ; Gallagher et coll., 1980 ; Heaney et coll., 1982).
La progression asymptomatique de l’ostéoporose d’involution et l’atteinte du nombre croissant d’individus lui ont valu le surnom d’épidémie silencieuse (Geusens, 1992). L’évolution clinique est émaillée d’épisodes de fractures, mais elle est aussi marquée, plus insidieusement, par une altération de la qualité de la vie dans ses dimensions physiques, psychologiques et sociales (Thévenon et coll., 1994 ; Riggs et Melton, 1995).
la raréfaction osseuse est responsable d’un risque accru de fracture étant donné que la masse rend compte de la résistance mécanique dans une proportion de l’ordre de 75 à 85% (Smith et Smith, 1976 ; Mazess, 1982 ; Melton et coll., 1988 ; Moseklide, 1993). Cette association a été démontrée dans différents sites comme le col féroral (Dalén et coll., 1976 ; Delaere et coll., 1989 ; Houde et coll., 1995), les vertèbres lombales (Weaver et Chalmers, 1966 ; Bell et coll., 1967 ; Galante et coll., 1970 ; Hansson et coll., 1980 ; Moekilde et coll., 1987 ; Eriksson et coll., 1989 ; Vesterby et coll., 1991), el plateau tibial (Carter et Hayes, 1976) ou le calcanéus (Weaver et Chalmers, 1966).
Le parallélisme entre l’importance de l’ostéopénie et la fragilité liée à la perte des propriétés mécaniques n’est pas absolu (Bell et coll., 19967 ; Wall et coll., 1979 ; Riggs et Melton, 1986 ; Geusens, 1992 ; Heaney, 1993). En effet, des fractures surviennent chez certains patients dont le capital osseux est normal pour l’âge (Wicks et coll., 1982 ; Cummings, 1985) tandis qu’elles en épargnent d’autres qui, sur base des mêmes critères seraient rangés parmi les personnes à haut risque (Hansson et coll., 1980 ; Mazess, 1990).
D’autres facteurs, extra- et intra-osseux, interviennent donc dans la fragilisation du squelette. Les contingences extra-osseuses comprennent, notamment, une propension à tomber, une altération des réflexes posturaux lors d’une chute et une raréfaction des tissus mous au point d’impact (Cummings, 1985 ; Heaney, 1993). Des caractéristiques intra-osseuses, comme la qualité du remaniement, la structure tridimensionnelle de l’os et sa capacité d’adaptation à des charges spécifiques, sont également susceptibles d’influencer sa résistance mécanique (Bell et coll., 1967 ; Pugh et coll., 1973a ; Wagner et coll., 1991 ; Parfitt, 1984b ; Kleerekoper et coll., 1985 ; Delaere et coll., 1989 ; Vesterby et coll., 1991 ; Mosekilde, 1993 ; Compston, 1994). Avec l’âge, celle-ci peut être compromise par des perturbations de la qualité du tissu suite à une modification du réseau trabéculaire, à une réduction d’élasticité de la matrice collagénique, à des variations dans la géométrie de la phase minérale, à la fragilité accrue de l’os sénescent hyperminéralisé (Frost, 1985 ; Moseklide et coll., 1987) ou, enfin, à l’accumulation de microlésions, dont la réparation est moins efficace qu’au début de la vie adulte (Melton et coll., 1988).
La définition actuelle de l’ostéoporose, qui intègre ce conet de perte de qualité, structurale ou mécanique (Frost, 1985 ; Geusens 1992 ; Johnston et Slemenda, 1995), témoigne d’une approche plus large que celle de la masse osseuse considérée isolément. L’intégrité squelettique est également essentielle dans la notion de longévité des systèmes de fixation, dont l’arthroplastie totale de la hanche (Stulberg et coll. 1989), d’autant plus que les prothèses sont, en majorité, placées chez des patients de plus de 50 ans.
Bibliographic reference |
Nyssen-Behets, Catherine. Altérations osseuses microstructurales dans le vieillissement du squelette. Prom. : Dhem, Antoine |
Permanent URL |
https://hdl.handle.net/2078.1/247586 |