Rubay, Jean
[UCL]
Dans les valvulopathies congénitales, les allogreffes valvulaires, aortiques et pulmonaires, représentent avec les autogreffes une alternative thérapeutique pour la correction chirurgicale des voies d’éjection du cœur.
L’expérience initiale acquise avec ces valves, utilisées isolément ou associées à leur tronc artériel, a été décevante en raison de l’apparition précoce de dégénérescence tissulaire et de calcifications attribuées aux méthodes de stérilisation et de conservation. Ces méthodes faisaient appel aux bêta-propionolactones pour la stérilisation et à la glutaradehyde pour la fixation [TALMAN188].
Ces complications engendrèrent une vague de désintérêt pour les allogreffes tandis qu’elles contribuèrent au succès des valves d’origine animale – hétérogreffes – et des conduits valvulés à l’aide de ces valves ou même de valves mécaniques. Les résultats ne furent guère plus probants, avec l’apparition de lésions dégénératives responsables de sténoses et de réinterventions [SCHOEN 173], d’autant plus précocement que le patient était plus jeune [SANDERS 169 et WILLIAMS 200], favorisant par la même occasion le retour à l’utilisation des prothèses mécaniques.
Une modification profonde des méthodes de préparation des allogreffes valvulaires, basée sur la stérilisation par les antibiotiques et une conservation par la cryopréservation a suscité un regain d’intérêt [O’BRIEN 137, 138] et a contribué à l’essor de banque d’allogreffes [MERMET 131, O’BRIEN 138, RUFFIE 166], dont la première banque d’allogreffes cryopréservées en Belgique créée à l’U.C.L. en 1983.
En position droite, les allogreffes pulmonaires cryopréservées présentent de multiples caractéristiques susceptibles d’en faire un substitut préférentiel. Aucune anticoagulation n’est nécessaire et la constitution tissulaire identique à celle du tissu receveur en facilite l’implantation. Leur flexibilité permet l’insertion de plus grands diamètres et leur sensibilité aux calcifications est moindre grâce à leur architecture histologique. A dimension égale, leur profil hémodynamique est plus favorable que celui des allogreffes aortiques. Le tronc artériel pulmonaire est un conduit naturellement bifurqué qui autorise une implantation éventuelle sur les branches pulmonaires [BANDO 9 et DAENEN 37]. Leur croissance n’a toutefois pas été démontrée.
Dans le traitement de la tétralogie de FALLOT, CLARKE et coll. [28] préconise l’utilisation d’une allogreffe valvulaire pulmonaire de première intention, en alternative à la plastie transannulaire élargissante de la chambre de chasse du ventricule droit et de l’artère pulmonaire. Afin d’éviter cette dernière éventualité ou de retarder la mise en place d’une allogreffe, notre équipe a introduit un protocole de dilatation annulaire par angioplastie percutanée visant à développer la voie artérielle pulmonaire [SLUYSMANS 182].
Dans le traitement des séquelles pulmonaires de la chirurgie de la tétralogie de Fallot, nous avons adopté un protocole de valvulation par allogreffes valvulaires pulmonaires.
En position gauche, le remplacement valvulaire aortique chez l’enfant par une prothèse mécanique ou une hétérogreffe confronte le clinicien avec une variété considérable de problèmes : la croissance de l’enfant et son corollaire, le risque de réintervention, les contraintes hémodynamiques liées aux prothèses de petite dimension, leurs caractères palliatifs ou dégénératifs, les risques liés à l’usage à long terme de médications anticoagulantes et les risques infectieux.
Les hétérogreffes dégénèrent rapidement chez les enfants, d’autant plus vite qu’elles sont implantées ç un plus jeune âge [SANDERS 169 et WILLIAMS 2000].
L’emploi de prothèses mécaniques donne des résultats globalement satisfaisants [BAUDET 10], abstraction faite du risque opératoire et des risques d’accidents thrombo-emboliques [SADE 167]. Elles demeurent une procédure majeure, surtout chez l’enfant en bas âge [KONNO 109 et RUBAY 162].
La mise ne place d’une prothèse en position aortique, généralement de petite dimension et, souvent au prix de plasties d’élargissement de l’anneau [KONNO 109], conduit immanquablement à un remplacement à l’adolescence en raison de la croissance.
La sévérité de ce geste, surtout chez l’enfant en bas-âge, a fortement contribué à l’essor des valvuloplasties percutanées, gestes palliatifs et itératifs, visant à postposer la mise en place d’une prothèse mécanique.
L’amélioration de la qualité du prélèvement et de la conservation des allogreffes a conduit à un regain d’intérêt pour ces valves en position gauche [O’BRIEN 137, 138].
Leur profil hémodynamique et leur résistance à l’infection [HAYDOCK 74, McGRIFFIN 129, O’BRIEN 140] ont été largement démontrés et leur diffusion s’est répendue grâce aux banques d’allogreffes.
Leur utilisation s’adresse aux adultes jeunes, présentant des valvulopathies aortiques, souvent séquellaires de lésions congénitales. Leur potentiel dégénératif et leur absence de croissance ont freiné leur mise en place chez l’enfant [LANGLEY 117, O’BRIEN 140].
La familiarisation avec les techniques d’implantation de ces valves a favorisé la réactualisation de l’opération de ROSS [156], au cours de laquelle la valve aortique pathologique est remplacée par la valve pulmonaire du patient. Cette technique d’autogreffe pulmonaire refait actuellement surface au sein des équipes les plus audacieuses.
L’opération de Ross illustre la synthèse de l’approche thérapeutique des valvulopathies congénitales puisqu’elle autorise la croissance de l’enfant, la valve se développant avec lui, et permet l’abstention de toute thérapeutique anticoagulante. L’autogreffe, constituée de tissu vivant, garde une plus grande résistance à l’infection et n’est soumise à aucun processus dégénératif. Elle constitue un substitut avantageux et peut-être définitif en position gauche [ROSS 158]


Bibliographic reference |
Rubay, Jean. Allogreffes et autogreffes valvulaires cardiaques dans le traitement des cardiopathies congénitales affectant les voies d'éjection droite et gauche. Prom. : Vliers, André ; Schoevaerdts, Jean-Claude |
Permanent URL |
https://hdl.handle.net/2078.1/247585 |