Frisson cutané, chair de poule, larmes qui montent aux yeux, "être ému" : exploration du rôle de l'empathie et de l'absorption dans son ressenti et création d'un prototype émotionnel

Etre ému se caractérise par une « explosion émotionnelle » (McCrae, 2007) soudainement envahissante (Tan, 2009) qui est, la plupart du temps, provoquée par des stimuli divers qui font souvent appel à nos valeurs (Cova & Deonna, 2013) ou à des expériences hors du commun (Konečni, 2005). Elle s’accompagne d’un frisson cutané se répandant le long du corps (Konečni, 2011) et de larmes aux yeux (Vingerhoets & Bylsma, 2015). Suite à une analyse exhaustive, on déduit que l’émotion se déclenche suite à une interaction entre le stimulus déclencheur et certaines caractéristiques individuelles, expliquant ainsi pourquoi certains individus sont souvent émus et pourquoi certains ne le sont jamais. Le premier but de notre étude a été d’explorer plus finement le rôle de deux traits de personnalité pouvant intervenir dans le ressenti de l’émotion : l’empathie et l’absorption. Les analyses de 216 questionnaires portant sur ces traits de personnalité et sur la tendance à être ému montrent que plus la personne est empathique et facilement « absorbable », plus celle-ci aura tendance à être émue quotidiennement. Le deuxième but de notre étude a été de créer le prototype de l’émotion, afin d’esquisser une première définition d’un épisode typique pendant lequel un individu se sentirait ému (Shaver, Schwartz, Kirson & O’Connor, 1987). Grâce à 73 récits illustrant des épisodes pendant lesquels les répondants ont été émus, plusieurs déclencheurs, réponses physiologiques et comportements découlant de l’émotion ont pu être relevés. Néanmoins, les résultats montrent que ces caractéristiques sont trop nombreuses et diversifiées, excluant ainsi toute possibilité de création d’un prototype. L’hypothèse avancée pour expliquer ce phénomène est que l’explosion émotionnelle accompagnant l’émotion serait traduite et interprétée de façon très différente selon la personne, résultant ainsi en une variété immense de ressentis et de déclencheurs (Rimé, Philippot & Cisamolo, 1990). Chacun essaye d’expliquer, à sa façon, la brève perte de contrôle vécue lors du ressenti émotionnel, ce qui expliquerait l’inconsistance des réponses obtenues.