Abstract |
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Développée à partir d’une analyse sans concession de l’œuvre de Husserl, la phénoménologie de la vie de M. Henry constitue une revalorisation radicale de la subjectivité. Elle conduit à une critique originale de tous les domaines de la culture, qu’il s’agisse de la valeur pathétique de l’œuvre d’art, de la critique du marxisme, de l’analyse de la science moderne et de la technique. « L’œuvre, comme moi-même ou les autres, nous sommes dans la vie qui est à la fois une Vie universelle et chaque fois la mienne… On est au cœur d’un mystère qui est plus qu’un mystère philosophique, qui est le mystère de l’être autour duquel tournent les plus grandes religions, et certainement le christianisme. » Publiés pour la première fois dans leur intégralité, ces entretiens avec Olivier Salazar-Ferrer, introduits et commentés par Jean Leclercq et Grégori Jean, constituent une introduction idéale pour aborder l’œuvre de ce grand philosophe. M. Henry (1922-2002) se trouvait au seuil du tournant qui marquera ses dernières œuvres. Ces entretiens portèrent particulièrement sur les ouvrages suivants : La Barbarie, Voir l’invisible Kandinsky, Du communisme au capitalisme (1990) et sur son importante étude Phénoménologie hylétique et phénoménologie matérielle (1987) parue dans la revue Philosophie. Sa critique de la phénoménologie husserlienne conduit à une revalorisation du substrat non intentionnel de la culture, en reprenant au fond la critique menée par Nietzsche contre l’idéalisme, mais en la replaçant dans une métaphysique de la Vie repensée à partir de la phénoménologie husserlienne. La puissance subversive de sa pensée, eu égard aux idoles de la techno-science, aux distanciations des mondes virtuels induits par la culture informatique et aux abstractions « déréalisantes » pour l’individu vivant, s’était pleinement exprimée dans La Barbarie, et plus largement, dans une philosophie du corps qui s’inscrivait elle-même dans la crise inaugurée par la révolution galiléenne. Semblable au travail d’un sourcier, la pensée de M. Henry tend à retrouver sous le primat du concept un principe de vie qui enracine dans la subjectivité un nouveau vitalisme, très différent des vitalismes d’essence biologique à cause de sa méthode phénoménologique. En 1990, M. Henry amorçait également la constitution d’une réflexion sur le Christianisme, rejoignant les œuvres de Maître Eckhart qui seront pleinement exprimées dans C’est moi la vérité (1996) et dans ses ouvrages ultérieurs. |