VAN HOLLEBEKE, Sarah
[UCL]
Cette thèse explore les épreuves de la rencontre entre professionnels du logos et spécialistes de la production visuelle appelés aujourd’hui à se coordonner dans les procédures de l'urbanisme de projet. Elle met en lumière la manière dont ces acteurs, attendus comme experts de la parole et de la vie ordinaire, peuvent aujourd’hui intervenir sur la rénovation d’un quartier, la conception d'un espace, le design d'un bâtiment, ou la planification et l’aménagement d'un territoire. Si des professionnels du discours et, de manière large, des experts en sciences sociales sont régulièrement invités à « prendre part » activement aux politiques de la ville, ces dernières semblent encore largement cadrées par des disciplines dont le mode privilégié pour représenter les territoires, visualiser les problèmes, agir sur eux et concevoir les espaces est l’image. À ce titre, la thèse décrit (i) les conditions de recevabilité des savoirs plus minoritaires ; et (ii) la réceptivité du milieu de l'urbanisme et de la planification à leur égard. L’enquête menée dans le contexte bruxellois repose sur un travail généalogique et ethnographique qui nous a amenés à suivre sur le temps long les expériences concrètes de ces experts engagés dans plusieurs arènes de confrontation des savoirs urbains : d’un dispositif d’urbanisme participatif classique jusqu’aux modalités actuelles d’une recherche urbaine interdisciplinaire. Cette enquête multisituée, entre scènes et coulisses, exploration d’archives et immersion dans l’action, discours, affects et pratiques, pointe l'existence d'une asymétrie dans le degré de sérieux, d'autorité et de confiance qui est accordé à ces expertises. Elle éclaire également les (in)capacités de ces dernières à convoquer et maîtriser le « bon médium » pour prendre place dans le monde de l'urbanisme et de la planification peuplés d’objets et d’images. Les disciplines essentiellement discursives qui gardent encore en mémoire la critique des savoirs technocratiques ont une part de responsabilité dans l'infélicité de leurs propositions. Ces dernières ont pris l’habitude d'abandonner la question de la visualisation des problèmes urbains à d'autres et méprisent les schématisations pour leur caractère réducteur. Elles doivent pouvoir tirer les conclusions de ces « épreuves de réception » (Berger, 2018) et réfléchir à des façons de s'adapter pour se faire une place dans ce milieu. En définitive, nous défendons que la collaboration des intelligences de l'urbain ne se limite pas à une capacité à délibérer et débattre sur des problèmes, mais passe aussi par des médiations matérielles ou visuelles et des ajustements sensibles, quasi inconscients, entre des manières de voir, de sentir et d’agir sur la ville spécifiques à des mondes qui se touchent, se frottent et se côtoient sur le temps long.
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Bibliographic reference |
VAN HOLLEBEKE, Sarah. Professionnels du discours et spécialistes de l’image dans le projet urbain : enquête sur une asymétrie des collaborations entre experts de la ville . Prom. : Berger, Mathieu ; Thibaud, Jean-Paul |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/251326 |