Loos, Roxanne
[UCL]
Envisagées comme lieu intermédial alliant les qualités de la peinture et de l’architecture dans laquelle elle s’inscrit, les fresques de la Renaissance italienne apparaissent comme le médium privilégié pour questionner l’art de l’entre-deux et le passage entre les arts. Ce rapport étroit s’observe tout particulièrement lorsque la peinture se met à réfléchir l’architecture en son sein, c’est-à-dire lorsqu’elle épouse les contours du cadre architectural réel dans lequel elle s’inscrit en reproduisant à son tour un cadre architectural, fictif cette fois. Placé au seuil de la représentation, le cadre se présente dès lors comme une interface fondamentale pour appréhender les relations entre l’espace de la fiction et l’espace du spectateur, spatialités dont il détermine les frontières mais aussi et surtout les passages. En d’autres termes, il s’agira de saisir la manière dont ces cadres peints, qui empruntent au vocabulaire architectonique de l’entrée (porte, fenêtre, arche, etc.), donnent à voir les frontières de la représentation pour mieux les transgresser et ainsi contribuer à la production du sens, à comprendre à la fois comme signification (message véhiculé) et effets sensibles (perception du spectateur). Parmi plusieurs dispositifs encadrants, notre attention se focalisera notamment sur le modèle de l’arc-cadre avec un proscenium mettant en scène la représentation, comme dans la chapelle Carafa à l’église Santa Maria sopra Minerva (Filipinno Lippi, c. 1488-1493). Cet exemple, où un escalier était initialement prévu à la place du faux soubassement marmoréen pour inviter le spectateur à entrer dans l’istoria, démontrera le rôle d’opérateur de passage que joue les bordures, particulièrement lorsque celles-ci sont transgressées par un personnage qui déborde du champ de la représentation. Dans cette perspective réflexive, nous verrons que la fiction peut également sortir de ses limites pour entrer dans la réalité. Ces questionnements aux confins entre peinture et architecture, entre espace pictural et espace spectatoriel, ou pour le dire autrement, entre fiction et réalité, nous permettrons en outre mettre en lumière la façon dont les (en)jeux du cadre propres à la Renaissance ont en partie jeté les bases de ce qui adviendra dans l’art maniériste et baroque, époques desquelles on date habituellement les premières formes de débordement du cadre.


Bibliographic reference |
Loos, Roxanne. À la limite et sur la limite de la représentation : (en)jeux des cadres d’architecture feinte au seuil des fresques.Entre-deux. Mouvements et métamorphoses du corps, de l’âme et de la peinture dans l’Europe de la Renaissance (XIVe-XVIe siècles) (Institut national d’histoire de l’art, Paris, du 26/05/2016 au 27/05/2016). |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/182367 |