Lavenne, François-Xavier
[UCL]
This thesis aims to highlight the crucial importance of temporal issues in the work of Céline. Time and its corollary, finitude, are the fracture to which his imaginative world seeks to give an answer, the situation confronted by his poetics. The question of time is a question of power. Céline seeks in the authority inherent in authorship the means to lead a revolt against the dictatorship of Chronos and give back to mankind a voice opposing the fatality of destiny. This quest involves exploring a series of postures that incarnate envisaged strategies when faced with time and which can direct writing and life. In this movement, writing finds meaningful matrices in mythical figures - Chronos, Odysseus, Orpheus, the Fates - whose irradiation in the background of the text has been highlighted. The starting point for this research is the posture of the victim. The Celinian concept of time, characterised by a hatred of change, is rooted in the imaginative worldview of the small clothing business in which Ferdinand grew up in Mort à crédit. The association of duration with death finds dramatic confirmation in the trauma of the First World War, which swept away all certainties. Faced with this event, Céline explores two contradictory postures: the posture of the hero, who turns himself into the armed wing of destructive time, and the posture of the wanderer, anxious and cowardly. Throughout his odyssey, Bardamu questions the responses that societies have forged in order to solve the question of the meaning of existence. Far removed from this nihilism, the pamphleteer underlines his racial certainties and develops a reading of History based on the myth of the four ages. The transition from fiction to the genre of political polemic involves a break in the relation of writing to time. The pamphlets are saturated by current events, driven by the need to act on the present in order to change the course of history. They require an image of speech and its messenger that can ensure their effectiveness and justify their violence. The pamphlet then sees the reintroduction of a posture of hero-building and the exacerbation of an aristocratic imagination. After the war, Céline was forced to redefine his authorial posture, trying to take advantage of the controversies that surrounded him. He positions himself as a dandy in the face of history, on which he strives to set the mark of his style. The chronicler dramatises himself in the form of Orpheus returning from Hell, the only one able to resurrect the past by spinning text, in opposition to the spinning of the Fates. He dreams of survival, thanks to the act of the reader, as a kind of ghost that will never cease to haunt literature.
(fre)
Cette thèse s’attache à mettre en évidence l’importance cruciale de la question temporelle dans l’œuvre de Céline. Le temps et son corollaire, la finitude, sont la fracture à laquelle son imaginaire tente d’apporter une réponse, le constat devant lequel sa poétique se dresse. La question du temps est une question de pouvoir. Céline cherche dans l’autorité inhérente à l’auctorialité le moyen de mener une révolte contre la dictature de Chronos pour rendre à l’homme son mot à dire face à la fatalité du destin. Cette quête passe par l’exploration d’une série de postures qui sont les incarnations de stratégies envisagées face au temps pour diriger la plume et la vie. Dans ce mouvement, l’écriture trouve des matrices signifiantes dans des figures mythiques – Chronos, Ulysse, Orphée, les Parques – dont l’irradiation à l’arrière-plan du texte a été mise en évidence. Le point de départ de cette recherche est la posture de la victime. La conception célinienne du temps, caractérisée par la haine du changement, plonge ses racines dans l’imaginaire du petit commerce de mode. Dans Mort à crédit, l’auteur développe une conception de la temporalité comme une comptabilité à maintenir en équilibre face à un banquier – Chronos – qui n’alloue que peu de crédits, dans un univers en mutation permanente soumis à des mouvements imprévisibles. L’association de la durée avec la mort trouve une confirmation dramatique dans le traumatisme de la Première Guerre mondiale qui balaie toutes les certitudes. Face à cet événement, Céline explore deux postures contradictoires, celle du héros, qui se fait le bras armé du temps destructeur, et celle de l’errant, lâche et angoissé. Au fil de son odyssée, Bardamu remet en question les réponses que les sociétés ont forgées pour résoudre la question du sens de l’existence. Loin de ce nihilisme, le pamphlétaire martèle ses certitudes raciales et développe une lecture de l’Histoire fondée sur le mythe des quatre âges. Le passage de la fiction au genre de la polémique politique implique une rupture dans le rapport de l’écriture au temps. Les pamphlets sont des textes saturés par l’actualité, animés par l’urgence d’agir sur le présent pour modifier le cours de l’Histoire. Ils requièrent une image du discours et de son énonciateur de nature à assurer leur performativité et à justifier leur violence. Le pamphlet voit alors la réintroduction d’une posture d’héroïsation et l’exacerbation d’un imaginaire aristocratique. Après la guerre, Céline se voit contraint de redéfinir sa posture auctoriale en tentant de tirer parti des polémiques qui l’entourent. Il se situe face à l’Histoire en dandy qui tente d’apposer sur elle la signature de son style. Le chroniqueur se met en scène sous les traits d’un Orphée revenant des Enfers, seul à même de ressusciter le passé par le filage du texte qui s’oppose au filage des Parques. Il rêve de survivre, grâce à l’acte du lecteur, comme une sorte de spectre qui n’en finira pas de hanter la littérature
Bibliographic reference |
Lavenne, François-Xavier. Céline contre Chronos : du pamphlet au roman, une posture auctoriale pour défier le temps destructeur. Prom. : Watthee-Delmotte, Myriam ; Jacques, Georges |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/156358 |