Les enfants de la rue à Kinshasa et le sida : approche de la prévention articulant les concepts d'éthique narrative et de "capabilités"

(fre) Cette thèse propose une relecture de la problématique de prévention et de soins – dans le contexte de vulnérabilité- envers les capabilités des enfants de la rue, à partir d’une approche d’éthique narrative et d’anthropologie de la santé. Notre hypothèse forte est que, pour sortir de l’impasse du paradigme universalisme/relativisme et de la dichotomie entre besoin et offre de prévention et de soins, il est adéquat de mettre en œuvre une démarche dialogale (de bas en haut), du type universel pragmatique. Celle-ci entraine un « double avantage éthique ». Il s’agit d’abord d’ouvrir nos approches de santé publique à l’altérité et au pluralisme, d’enrichir notre base d’informations décisionnelles par les apports des autres traditions et pratiques, venant des individus usagers de prévention et de soins. Ensuite, de s’émanciper du « tout culturel quantifié » et prendre conscience de la complexité des individus et de l’existence d’un bien-être pluriel. Cela, à travers une approche d’évaluation décisionnelle, axée sur les réalisations que la personne peut choisir d’accomplir, c'est-à-dire ses capabilités. Ce double avantage éthique, qui demande de dépasser une approche purement statistique et utilitariste, nous mène à proposer une prévention des IST/VIH/SIDA articulant les concepts d’éthique narrative et de capabilités, c'est-à-dire une pratique de prévention qui considère les réalisations que la personne peut choisir comme véritable objet d’action et d’évaluation. Notre perspective est donc bien dans l'esprit de notre groupe de recherche et les travaux qui ont été menés ces dernières années, pour introduire la perspective d'économie de la santé compatible avec l'éthique, telle qu'elle a été développée par Amartya Sen et le groupe « Human Development and Capabilities » (HDCA). Cette approche de prévention procédurale, fondée sur l'importance donnée aux choix libres des enfants de la rue de Kinshasa, peut se traduire par un changement de paradigme de l'approche de prévention et de soins éventuels. Au travers des actes concrets simples et quotidiens fondés sur la recherche de leur survie et la reconnaissance de leurs capacités, ces enfants veulent devenir ou être coresponsables de leur projet de vie et de santé. Le but est d’améliorer la prise en charge, dans une perspective participative, qui devient axée sur les capacités en santé publique et est conjuguée aux normes d’action sanitaire. L'originalité de notre démarche est d'articuler le courant bioéthique d'éthique narrative fondée sur la biographie du sujet et la théorie des capabilités d’Amartya Sen qui a rénové la perspective du développement en santé publique.