Dagneaux, Isabelle
[UCL]
Two paradigmatic views of deafness situate it either in the field of disability, or in a cultural assertion, mostly in an exclusive way. Our analysis of issues linked to the concepts of disability, of deficiency or of deaf culture invites us, on the contrary, to question these two paradigms and to do it dialectically. In our opinion, we should consider the emergency of deaf cultures in a narrow bond to the absence of hearing and the use of sign languages. The Canguilhemian notion of normativity allows us to consider this passage from a situation which is marked by a deficiency to the creation of life forms that are characterized by new norms. These life forms are, like any other, marked by a finitude and a contingency that are no obstacle to life but orient the subjects’ relation to the world. This relation to the world can be described as “right and sufficient” by revealing more particularly the role of cerebral plasticity and sensory redundancy in the subject‘s construction in relation to the environment. The perception pattern in the absence of hearing, the share of sign languages, the world perception and its individual as well as collective symbolic construction represent as many interactive elements in this normative process, which is the emergency of a culture. The deaf cultural assertion leads us this way to an anthropological concern to think about the foundations of other cultures as well as about some issues of the meeting of cultures – more particularly of majority and minority cultures. This investigation of the paradigms and concepts that are put into play by pre-lingual deafness, allows us as well to explore new tracks when faced with the ethical issues that are being raised in the field of healthcare.
(fre)
Deux visions paradigmatiques de la surdité la situent soit dans le champ du handicap, soit dans une affirmation culturelle, le plus souvent de façon exclusive. Notre analyse des enjeux liés aux concepts de handicap, de déficit et de culture sourde nous invite au contraire à interroger ces deux paradigmes de façon dialectique. Il faut, selon nous, penser l’émergence de cultures sourdes en lien étroit avec l’absence d’audition et l’usage de langues signées. La notion canguilhémienne de normativité permet d’envisager ce passage d’une situation marquée par un manque à la création de formes de vie caractérisées par de nouvelles normes. Ces formes de vie sont, comme les autres, marquées par une finitude et une contingence qui n’empêchent pas la vie mais orientent le rapport au monde des sujets. Ce rapport au monde peut être qualifié de « juste et suffisant » en montrant en particulier le rôle de la plasticité cérébrale et de la redondance sensorielle dans la construction du sujet en lien avec l’environnement. La configuration perceptive en l’absence d’audition, le partage de langues signées, la perception du monde et sa construction symbolique tant individuelle que collective constituent autant d’éléments en interaction dans ce processus normatif qu’est l’émergence d’une culture. L’affirmation culturelle sourde constitue ainsi une interpellation anthropologique pour penser les fondements d’autres cultures ainsi que certains enjeux de la rencontre des cultures – en particulier entre cultures majoritaires et minoritaires. Cette interrogation sur les paradigmes et concepts mis en jeu par la surdité prélinguale permet également d’ouvrir des pistes face aux questions éthiques suscitées dans le champ des soins de santé.
Bibliographic reference |
Dagneaux, Isabelle. Les sourds, une minorité culturelle et linguistique : déni du handicap ou défi pour la culture ? . Prom. : Feltz, Bernard |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/192581 |