Roginsky, Sandrine
[UCL]
Quand ils s’intéressent aux usages des sites de réseaux sociaux dans le champ politique, un certain nombre de chercheurs semblent partir du principe que l’interaction entre élus et citoyens est l’innovation principale qui caractérise ces outils (Coleman & Blumler, 2009 ; Jackson & Lilleker, 2009 ; Graham & al., 2013 ; etc.). Mais Skovsgaard et Van Dalen (2013) soulignent que le dialogue avec les citoyens sur les médias sociaux est un élément largement sur-évalué. Il y a ainsi un décalage entre les attentes des chercheurs et les utilisations concrètes des praticiens. Larsson (2013) rappelle que les politiciens, comme comme tout usager, développent des usages des technologies qui ne sont pas nécessairement prévisibles : ils peuvent ne pas utiliser certaines fonctionnalités mais avoir une utilisation innovante et inattendue d’autres fonctionnalités. Peut-on alors considérer que les potentialités des dispositifs sont ignorées par les acteurs politiques (Theviot, 2013) ? Rien n’est moins sûr. Mais surtout l’on voit ici la nécessité de mieux connaître l’expérience des acteurs politiques en situation pour comprendre leurs usages et pratiques. C’est ce que se propose de faire la recherche longitudinale (2009-aujourd’hui) sur laquelle s’appuie cette communication. La période couverte intègre le temps de l’élection et le temps du quotidien. Il est ainsi possible de montrer - ce que fera la communication proposée - comment les usages des sites de réseaux sociaux reconfigurent certaines pratiques professionnelles et, ce faisant, stimulent plutôt qu’ils ne découragent la proximité entre les mondes politiques et médiatiques aux frontières déjà floues (Gringas, 2009). Reconfiguration des pratiques d’un côté et permanence de l’autre : si les sites de réseaux sociaux offrent une nouvelle plateforme aux acteurs politiques, ceux-ci continuent de s’adresser principalement aux mêmes types de publics. Comme les usages des sites de réseaux sociaux n’ont pas seulement lieu « en ligne » - Internet étant ancré dans d’autres espaces sociaux (Miller & Slater, 2000) - comprendre des usages des dispositifs numériques nécessite une mobilité entre les contextes de production et les usages d’un côté et l’espace « en ligne » et « hors ligne » de l’autre (Hine, 2009). Il est donc nécessaire de diversifier les méthodes de collecte et d’analyse de données : à l’observation participante des premiers temps (2009-2012) s’est ajoutée la conduite d’entretiens semi-directifs (2009-aujourd’hui), ainsi que la collecte de données en ligne (2009-aujourd’hui), avec une extraction systématique des tweets des députés européens belges, britanniques, espagnols et français (octobre 2013-aujourd’hui). Ce dispositif méthodologique sera présenté brièvement, ainsi que le cadre théorique de la recherche : comme il s’agit ici d’étudier un phénomène en cours de stabilisation, une approche critique des usages est nécessaire (Coutant & Domenget, 2011) qui s’attache à comprendre à la fois les dispositifs de réseaux sociaux et les usages qui en sont faits. Celle-ci nécessite une certaine mobilité théorique et une optique interdisciplinaire, d’où un détour par la sociologie politique.
Bibliographic reference |
Roginsky, Sandrine. Des deux côtés de l'écran: analyse des usages des réseaux sociaux "Facebook" et "Twitter" dans le champ politique. Le cas des députés européens.Colloque international "Réseaux sociaux et acteurs politiques: quelle communication politique aujourd'hui?" (Institut des sciences de la communication, Paris, du 17/06/2016 au 18/06/2016). |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/186485 |