Balde, Mamadou Sanoussy
[UCL]
Moyson, Stéphane
[UCL]
Après la décolonisation en Afrique, les nouveaux États indépendants se sont inspirés des textes fondateurs des anciennes puissances colonisatrices pour asseoir leurs institutions et organes politiques. À l’image des démocraties européennes, les ordres juridiques internes en Afrique appelaient au respect des libertés et de l’État de droit, à la séparation des pouvoirs, et encourageaient surtout l’alternance politique par le biais d’élections régulières. La constitution était donc vue comme un instrument de limitation des mandats politiques. Mais déjà à cette époque-là, même si des élections avaient été organisées, celles-ci ne respectaient guère le jeu démocratique car c’est le même parti unique qui sortait vainqueur des urnes et l’opposition était quasi-inexistante. Ce formalisme démocratique a donc vite laissé la place à des régimes autoritaires. Plusieurs décennies après la « troisième vague de démocratisation » selon l’expression de Samuel Huntington, il est toujours judicieux de questionner cette problématique pour comprendre la multiplicité des chemins qui peuvent conduire des régimes dictatoriaux vers l’espace des libertés, de la démocratie et de l’État de droit. Dans les années qui ont suivi cette période décrite par Huntington, l’euphorie a vite laissé la place à la désillusion car à ce jour encore peu d’institutions politiques en Afrique peuvent se targuer de l’étiquette d’État démocratique. La scène politique africaine reste encore marquée par des querelles autour des structures et modes de passation du pouvoir politique. Ceci suggère que l’application correcte des règles démocratiques reste encore une nécessité impérieuse sur le continent et l’organisation régulière des élections ne constitue pas à elle seule une garantie de consolidation démocratique. Au lieu de renforcer les acquis démocratiques à travers la représentation nationale, les élections vont même souvent jusqu’à diviser, d’une part, les leaders politiques et, d’autre part, les citoyens avec très souvent des relents ethniques et communautaires. Les moments électoraux sont périodiquement émaillés de crises engendrant des incidences à plusieurs niveaux de la structure étatique : politiques, institutionnelles, sociales, économiques, ethnico-religieuses, etc. Ainsi, nous nous retrouvons dans un paradoxe total : les élections, au lieu d’être un « moyen de concilier les intérêts sociaux divergents de la collectivité », produisent plutôt d’autres effets tels que l’instabilité, la montée de la violence et la perte de sens pour l’électeur. La démocratie est-elle un facteur de stabilité ou d’instabilité en Afrique ? En tentant de répondre à cette question de recherche, notre mémoire se consacre à l’analyse des liens entre démocratie, élections, et (in)stabilité politique en Afrique. Notre objet est de comprendre, non seulement, les liens existant entre élections et (in)stabilité en Afrique mais aussi les raisons qui pourraient expliquer ces liens en étudiant le cas particulier de la République de Guinée. En creux, c’est donc aussi une question normative qui est posée dans ce mémoire : les États africains gagnent-ils réellement à être démocratisés ?


Bibliographic reference |
Balde, Mamadou Sanoussy. Elections, crises et instabilités politiques : l'analyse d'un paradoxe africain. Le cas de la Guinée. Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication, Université catholique de Louvain, 2019. Prom. : Moyson, Stéphane. |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:20517 |