Une glorification des figures féminines antiques à la fin du Moyen Âge? Le canon des Neuf Preuses dans les ballades d'Eustache Deschamps et dans la compilation biographique de Sébastien Mamerot

À la fin du Moyen Âge apparaît un groupement de neuf héroïnes antiques, principalement des Amazones, dans quelques manifestations publiques, des œuvres littéraires ou encore des œuvres iconographiques, sous la dénomination des « Neuf Preuses ». Bien que la liste des noms soit instable (on peut y retrouver, selon les témoignages, Lampedo, Marpésie, Penthésilée, Sinope, Hippolyte, Ménalippe, Tomyris, Teuca, Sémiramis, Déiphyle, Argine…), les Neuf Preuses sont considérées comme la contrepartie féminine d’une autre liste préexistante, celle des Neuf Preux, qui comprend quant à elle trois héros antiques (Hector, Alexandre, Jules César), trois bibliques (Josué, David, Judas Maccabée) et trois chrétiens (Arthur, Charlemagne, Godefroy de Bouillon). Ces Neuf Preuses se retrouvent notamment mises en scène, à côté des Neuf Preux, dans deux ballades d’Eustache Deschamps à la fin du XIVe ainsi que dans une compilation de biographies de Sébastien Mamerot dans la seconde moitié du XVe siècle. Cependant, la glorification littéraire de figures féminines en ces siècles encore profondément misogynes pose question. Ce mémoire s’attache à démontrer qu’au-delà de soutenir les rôles déjà remplis par les Neuf Preux (édification et exemplarité, glorification individuelle, sociale et familiale, etc.) en ces temps troublés de la fin du Moyen Âge, marqués par une classe chevaleresque en crise, les Neuf Preuses viennent en outre interroger la place de la femme et son évolution dans le contexte d’une crise de la masculinité (issue de la crise de la chevalerie) et de la Querelle des femmes.