Wenkin, Julien
[UCL]
Lekeuche, Philippe
[UCL]
Parmi les êtres humains qui disposent de conditions de vie décentes (besoins en eau et nourriture assurés, logement, accès aux soins de santé, etc.), un certain nombre d’entre eux ne sont pas heureux, et semblent même profondément malheureux. Suite à cette constatation, nous nous sommes posé la question de savoir si, au-delà de l’histoire singulière de chacun, il pouvait éventuellement exister une souffrance commune, un obstacle commun au bonheur. Nous avons alors décidé d’orienter notre recherche dans deux directions principales et conjointes via l’exploration d’un malaise de l’individu dans son rapport avec la société d’une part, et d’un malaise découlant de certains traits de la nature humaine d’autre part. Enfin, nous avons ciblé notre enquête dans un cadre spatio-temporel spécifique mais tout de même relativement large, en formulant la problématique suivante, qui a sous-tendu l’ensemble du travail : Face aux exigences de la société occidentale du XXe siècle, l’être humain ressentirait-il un malaise inhérent à sa nature humaine ? Pour y répondre, nous avons choisi de mener une réflexion théorique basée sur les conceptions et les analyses de quelques auteurs. Tout d’abord, nous avons décortiqué le raisonnement de Freud, étant donné que c’est lui qui a ouvert le débat sur l’existence d’un malaise dans la société. Ensuite, en nous référant aux travaux d’Alain Ehrenberg et Gilles Lipovetsky, nous avons mis en relief l’évolution des exigences sociales. Après, nous avons présenté les conceptions d’Eckhart Tolle et de Matthieu Ricard à propos d’un malaise propre au fonctionnement humain. Enfin, nous avons réalisé une intégration critique et synthétique de ces trois parties jusqu’alors distinctes pour répondre à la problématique énoncée. Les principaux résultats de notre enquête tendent vers une réponse affirmative quant à l’existence d’une souffrance commune au sein de la population occidentale du XXe siècle. Cependant, cette souffrance est perçue et interprétée différemment selon les auteurs que nous avons étudiés, notamment en raison du fait que ceux-ci appartiennent à des disciplines différentes et n’ont pas tous vécu dans le même contexte socio-historique. Le malaise relevé par Freud, plus spécifique à la première moitié du siècle, souligne une tension entre les pulsions érotiques et agressives des êtres humains et les exigences sociales fortement restricitves de cette époque ; cette tension provoquant une frustration et un sentiment de culpabilité inconscient généré par le Surmoi (ayant intégré ces exigences au sein de l’individu). Le malaise actuel est quant à lui davantage relatif à une souffrance narcissique et identitaire, liée à des exigences sociales qui se sont transformées en impératifs de réalisation de soi, ainsi qu’à une société constamment en changement, caractérisée par l’incertitude, le relativisme et la paradoxalité. Dans ce nouveau contexte, l’instabilité identitaire est plus que jamais au rendez-vous. Celle-ci est corroborée par les conceptions de Tolle et Ricard qui exposent un malaise issu de l’ego de l’être humain ; malaise que la société contemporaine amplifie en incitant l’ego à se développer sans cesse.


Bibliographic reference |
Wenkin, Julien. Malaise de l’individu au sein de la société occidentale du vingtième siècle. Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, Université catholique de Louvain, 2016. Prom. : Lekeuche, Philippe. |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:7481 |