Perception de la taille et contrôle de l’action en présence d’illusions visuelles

Cette étude comportementale adresse une question centrale à propos du fonctionnement du système visuel. Le modèle perception-action affirme que le traitement des informations visuelles est assuré par deux voies neuronales : la voie ventrale et la voie dorsale. Selon ce modèle, les deux voies traitent les mêmes informations visuelles mais utilisent des processus différents dans le but de remplir des objectifs différents. En effet, la voie ventrale serait responsable de la perception et traiterait les caractéristiques d’un objet par rapport au contexte visuel (selon une métrique dite “relative”). La voie dorsale, elle, serait responsable des actions visuellement guidées et traiterait les informations visuelles d’un objet indépendamment de l'environnement de ce dernier (selon une métrique dite “exacte”). L’objectif de l’étude est d'éprouver l’indépendance entre les deux voies supposée par le modèle. Il a été décidé d’étudier l’influence du contexte visuel, évalué au moyen d’une illusion de contraste de taille, sur le système perceptif et le système moteur. La question de recherche à laquelle nous avons essayé de répondre est la suivante : est-ce qu’une illusion visuelle de contraste de taille affecte de la même manière la perception et l’action? Pour ce faire, nous avons fait passer aux participants une tâche de jugement perceptif leur demandant de comparer deux lignes de taille différente et une tâche de jugement moteur durant laquelle ils ont dû déterminer s’ils étaient capables ou non de saisir une ligne entre leur pouce et leur index. Les lignes étaient intégrées dans des configurations de l’illusion de Müller-Lyer afin de modifier la taille perçue. L’illusion de Müller-Lyer modifie la taille perçue d’une ligne horizontale au moyen de flèches (=éléments de contexte) qui se situent aux deux extrémités de celle-ci. Le modèle perception-action prédit que les éléments de contexte responsables de l’illusion sont importants pour la perception, évaluée au moyen des jugements perceptifs, mais pas pour l’action, évaluée au moyen des jugements moteurs. Les résultats suggèrent que les réponses des participants sont influencées par l’illusion dans les deux tâches, ce qui suggère une communication entre les voies ventrales et dorsales. Des expériences complémentaires ont été menées afin de spécifier les éléments contextuels responsables de la modulation paramétrique de l’effet de l’illusion et afin de reproduire cet effet dans une tâche de reproduction où le participant ajuste lui-même la longueur d’une ligne à ce qu’il imagine être la taille de sa pince bidigitale ou à un modèle perceptif utilisé comme référence.