Gilet, Julien
[UCL]
Nihoul, Paul
[UCL]
La première partie analyse la directive « détachement des travailleurs » mise en place pour lutter contre la concurrence sociale déloyale et l’exploitation de la main-d’œuvre dite « low-cost ». Nous examinerons tour à tour les fondements du mécanisme de la directive et le concept de « noyau dur de règles impératives minimales ». Nous exposerons, à travers la jurisprudence de la Cour de justice, les abus auxquels le phénomène du détachement peut donner lieu, dès lors qu’il utilise les écarts de systèmes de protection sociale ou de réglementation du travail au sein de l’Union dans le sens d’un recul des acquis sociaux. La Cour de justice a interprété la directive de manière très restrictive, privant les États membres de prendre des mesures pour lutter contre la concurrence déloyale et d’imposer une protection et un traitement égal des travailleurs locaux et des migrants dans l’État d’accueil. Au-delà du dumping social, il convient de s’attarder sur une autre réalité du détachement des travailleurs. « Les conditions d’emploi peuvent s’apparenter, dans certains cas, à une forme d’esclavage moderne : salaires impayés, absence de protection sociale, dangerosité des postes occupés, hébergement de fortune ». Le cas des travailleurs agricoles roumains en Calabre, recrutés via des agences d’intérim puis détachés, illustre cette dérive. « Dans un contexte marqué par la flexibilisation du marché du travail, la politique salariale, voire la politique sociale au sens large, risque de servir de variable d’ajustement des politiques économiques et certaines garanties sociales pourraient être sacrifiées pour accroître, à court terme, la compétitivité ». La deuxième partie aborde la directive « services » qui organise l’ouverture des services à la libre concurrence en déréglementant les marchés nationaux des États membres de l’Union européenne. L’objectif de cette directive est la suppression des obstacles liés à la liberté d’établissement et à la libre prestation des services par la simplification du cadre règlementaire. Elle garantit l’élargissement du choix offert aux destinataires des services et l’amélioration de la qualité des services. La libéralisation du marché européen des services fait l’objet de nombreux débats en raison des risques liés aux délocalisations et fragmentations des processus de production vers des pays où les charges sociales et salariales sont moindres. Si auparavant ce paramètre s’est révélé secondaire dans les choix d’implantation des entreprises comme dans leur capacité à gagner des parts de marché, ce n’est plus le cas aujourd’hui. La conjoncture économique difficile est aussi propice aux réflexes protectionnistes des États membres. Une problématique où l'Union européenne apparaît à la fois comme le problème et la solution. La dernière partie traite du défi social européen. La disparité des systèmes de protection sociale des États membres constitue un frein à l'harmonisation sociale. Elle pose la question du devenir du modèle social. Au-delà du risque d’une course aux plus bas coûts et, partant au « moins-disant social » qui toucherait les pays industrialisés comme les pays émergents, elle remet en cause les bénéfices des progrès sociaux acquis au cours des dernières décennies.


Bibliographic reference |
Gilet, Julien. La course à la compétitivité menace-t-elle notre modèle social européen ?. Faculté de droit et de criminologie, Université catholique de Louvain, 2015. Prom. : Nihoul, Paul. |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:3551 |