"Prenez soin de vous, prenez soin des autres". Le travail bénévole de confection de masques à la lumière de l'éthique du care.

Ce mémoire traite du phénomène de confection de masques en tissu par des bénévoles pendant la crise de Covid19 en Belgique et plus particulièrement pendant le premier confinement (de mars à mai 2020). La question de la prise en charge du care ainsi que les concepts de responsabilité, vulnérabilités et interdépendances sont explorés et mis en regard d’une phrase fréquemment utilisée pendant cette période de pandémie : « prenez soin de vous, prenez soin des autres ». Cette recherche tente de répondre à la question suivante : « dans le contexte de pandémie de Covid-19 en Belgique, que peut nous apprendre le travail de fabrication de masques par des citoyen·ne·s sur la prise en charge du care dans notre société ainsi que la (re)distribution des responsabilités du « prendre soin » entre les individus et les institutions publiques ?”. L’hypothèse centrale postule que la phrase “prenez soin de vous prenez soin des autres” empêche de questionner le principe d’autonomie et continue d’invisibiliser le travail de care qui existe déjà dans notre société. L’analyse des pratiques d'un panel de couturières se base sur l’éthique du care. Ces théories permettent en effet d'aborder l’articulation entre les formes privées de care et les formes socialisées et collectives de solidarité qui nous (en tant qu’individus ou en tant que groupe) permettent (et particulièrement pendant cette période de pandémie) de faire face aux risques de l’existence. Les réflexions sur les pratiques et les normes de soin sont ainsi articulées avec les politiques publiques et le rôle de l’État. Les résultats obtenus postulent que les couturières ont endossé une responsabilité sociale, elles ont perçu un besoin particulier et y ont répondu par une action concrète et ciblée. La question de la responsabilité des pouvoirs publics n’a pas été déterminante dans leur mise à l’action. Ce qui a semblé déterminant dans leur processus de prise de décision était le contexte. Les pratiques des couturières sont à mettre en lien avec la situation plutôt qu’avec un arbitrage abstrait entre différentes valeurs morales. Cette recherche a révélé la nécessité de rendre visible le travail de care réalisé gratuitement pour pouvoir observer sa distribution entre différents groupes sociaux mais également de repenser les vulnérabilités et les dépendances qui concernent tout le monde sans exception. L'écoute et la valorisation des expériences des pourvoyeur·se·s de care permet de remettre du politique dans la vie sociale et, ainsi, d’envisager une société plus égalitaire.