Gestion du sanglier en Wallonie : verrouillages systémiques et interface chasseur/agriculteur

Depuis plusieurs décennies, la Wallonie doit faire face à une augmentation significative des dégâts de cultures dus à la présence de sangliers. En Condroz-Famenne, les premiers dégâts notoires ont été constatés dans les années 1980. Dans les Ardennes brabançonnes, zone située au nord du Brabant wallon et frontalière à la Région flamande, le sanglier est apparu il y a à peine cinq ans. Depuis, les dégâts ne cessent d’augmenter. En Wallonie, la législation prévoit que les dégâts de sangliers soient indemnisés directement par les locataires du droit de chasse des forêts d’où provient le gibier responsable. La question des dégâts de sanglier résonne donc au cœur des campagnes, à l’interface entre les différents acteurs de la ruralité, et modifie la nature des relations que ceux-ci entretiennent. À travers dix-sept interviews de terrain menées auprès d’agriculteurs, de chasseurs et d’agriculteurs/chasseurs, ce mémoire cherche à comprendre les dynamiques sociales, écologiques et économiques liées à cette problématique. Différents verrouillages ont ainsi été révélés. La dénaturation de certaines chasses, la méfiance portée par les chasseurs envers les agriculteurs et réciproquement, la différence de vision en matière de gestion de populations de sangliers entre la Flandre et la Wallonie, la difficulté pratique de réguler le sanglier en appliquant strictement la législation actuelle, ou encore les biais liés à la loi concernant les dégâts de grand gibier sont autant de verrouillages qui participent à la difficulté qu’éprouvent les acteurs de terrain à entamer une transition. Il ressort de cette étude que la situation s’envenime. Des pistes existent néanmoins qui, conjointement, permettraient d’enrayer cette dynamique négative : la création d’organes où se rencontreraient les décideurs flamands et wallons, agriculteurs et chasseurs, l’autorisation sous stricte condition du tir de nuit, et de l’usage du silencieux, la fauche de layons de tir dans les CIPAN, la classification du sanglier comme nuisible dans certaines régions, et finalement, au moyen des mesures précitées, l’obligation de régulation des populations pléthoriques.