Les enjeux des différentes dimensions du stigmate de la prostituée dans le débat entre abolitionnistes et réglementaristes concernant la reconnaissance de la prostitution comme profession légitime

Dans la première partie de ce travail, nous avons tenté de montrer, à travers l'analyse des origines du stigmate de la prostituée, que la prostitution n'est pas une activité immorale en soi mais qu'elle l'est en tant que construction sociale. La prostitution, en tant que forme de sexualité publique, est le lieu où se jouent des rapports de domination entre les sexes qui se traduisent par un contrôle social très strict et discriminatoire en vue de permettre aux hommes de s'assurer un droit d'accès au corps des femmes. Dans la deuxième partie, nous avons confronté les arguments des abolitionnistes à ceux des réglementaristes à propos du débat concernant la question de la légitimité de l'activité prostitutionnelle. Un des défauts que nous avons relevé dans les discours abolitionnistes est leur tendance à "essentialiser" la prostitution comme une activité attentatoire à la dignité humaine. Or si, de fait, les conditions de travail actuelles des prostituées sont telles que ces dernières sont exposées aux violences, insultes, mépris plus que n'importe quelle autre femme, le fait de considérer la violence comme intrinsèque au rapport prostitutionnel naturalise du même coup la domination masculine qui est la principale responsable de ces conditions de travail dégradantes. Pourtant, il est tout à fait possible d'imaginer la prostitution comme le lieu d'une sexualité libre car détachée des affects mais aussi d'une production de sens comme en témoignent les prostituées qui affirment développer dans leur métier des compétences aussi bien sexuelles que relationnelles. Si la prostitution pouvait s'exercer dans un cadre où les rapports entre les sexes seraient plus harmonieux, la prostitution gagnerait à être reconnue comme une profession légitime.