Morales Pacheco, Santiago
[UCL]
Dubuisson, Bernard
[UCL]
« En cas d'accident de la circulation impliquant un ou plusieurs véhicules automoteurs, tous les dommages subis par les victimes et leurs ayants droit et résultant de lésions corporelles ou du décès sont réparés solidairement par les assureurs ». D’apparence clair et concis, l’article 29bis camoufle en réalité de nombreuses zones d’ombre, et de notions qui de prime abord semblant aller de soi, sont dans les faits plus complexes à déterminer. Outre la notion d’accident de la circulation, celle de l’implication du véhicule dans l’accident en font partie. A bien y réfléchir, parler de causalité dans la loi du 21 novembre 1989 relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile en matière de véhicules apparaît comme une antinomie. La volonté de nos parlementaires lors de la conception de l’article 29bis tel que nous le connaissons aujourd’hui était en réalité d’évacuer toute question relative à la faute du conducteur ou au lien de causalité entre le dommage et le fait du véhicule, afin de faciliter la démonstration de la preuve et d’accélérer le processus d’indemnisation. A cet effet, nos parlementaires se sont inspirés de la république voisine et de leur loi Badinter de 1985, en posant la notion d’implication du véhicule comme pierre angulaire de l’édifice du système d’indemnisation automatique qu’il mettait en place. Pourtant nous le verrons, le fantôme de la causalité hante toujours les juridictions de fond lorsqu’il s’agit d’apprécier l’implication. Il semble à tout le moins délicat de ne pas devoir adopter un raisonnement qui ne soit pas emprunt de celui de la responsabilité aquilienne. Se pose alors cette question qui nous suivra tout au long de ce mémoire : l’implication et la causalité ne sont-elles pas en réalité un seul et même concept dont on aurait simplement travesti le nom ? Sont-elles réellement différentes l’une de l’autre ? Dans une première partie, nous délimiterons l’interprétation de la notion dans toutes ses composantes, au regard de la volonté initiale du législateur et des balises de notre Cour de cassation. En effet cette notion inédite, dont la définition fut laissée à la charge exclusive de la jurisprudence, provoqua rapidement des controverses alors insoupçonnées par notre législateur lors de l’adoption de la loi. C’est pourquoi il est utile d’analyser les différents points de vue et concepts y attenant. Le rôle quelconque, la survenance dans l’accident et l’absence de lien de causalité sont autant de points qu’il conviendra d’examiner, en sus des principes directeurs déduits par notre Cour suprême, en illustrant nos propos par des décisions critiquables sur le plan du droit. La question centrale de cette étude se développera ensuite dans une seconde partie, destinée à mettre en exergue l’ambivalence de la notion et sa géométrie variable. L’implication se départ-elle vraiment de la causalité pour en devenir une notion autonome, indépendante de la causalité ? Si tel est le cas, l’autonomie vaut-elle pour toutes les situations d’accident de la circulation ou seulement certaines ? L’appréciation d’un lien quelconque entre le véhicule et l’accident ne demande-t-elle pas un emprunt au raisonnement de la causalité ? Et surtout, peut on invoquer l’article 29bis afin d’indemniser les conséquences ultérieures de l’accident ? Voilà les questions auxquelles nous tenterons d’apporter une réponse tout en apportant un regard critique sur les principes déjà établis, et en s’efforçant de comparer dans la mesure du possible, les enseignements de la Cour de cassation française à cet égard.


Bibliographic reference |
Morales Pacheco, Santiago. Implication et causalité : deux notions pour une même réalité ? L'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989. Faculté de droit et de criminologie, Université catholique de Louvain, 2018. Prom. : Dubuisson, Bernard. |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:15962 |