Hick, Laurence
[UCL]
Dopagne, Frédéric
[UCL]
Protection nécessaire ou avantage excessif ? C’est la question qui se pose de plus en plus fréquemment concernant les immunités des Etats lorsqu’elles sont confrontées au droit d’accès au juge. Et pour cause, ces immunités posent la problématique suivante : un citoyen lambda se plaint d’un mauvais traitement de la part d’un Etat, par exemple de la torture, ou alors il cherche à obtenir gain de cause suite à un licenciement abusif à son encontre de la part d’un Etat,… les situations peuvent être multiples. Il décide de s’en plaindre devant les tribunaux, et que font-ils ? Souvent, l’affaire va s’arrêter là. L’Etat étranger va soulever son immunité de juridiction, ou son immunité d’exécution, constituant une fin de non-recevoir. L’affaire n’ira pas plus loin. Nous le verrons, les immunités des Etats ont comme objectif d’empêcher les poursuites, ou l’exécution forcée envers un Etat dans le but de préserver leur souveraineté et de mettre en avant l’égalité des Etats entre eux, en mettant un point d’honneur sur l’interdiction de juger ses semblables. Exposées de cette matière, les immunités semblent remplir des objectifs légitimes, et constituer dès lors, à première vue, une protection nécessaire. Cette approche, elle est tout à fait justifiable si l’on se positionne du côté de l’Etat. Mais si nous nous plaçons du côté du citoyen, est-il correct de ne pas pouvoir poursuivre l’Etat responsable de notre torture ? Peut-être notre voisin a-t-il vécu lui-même des faits semblables, mais cette fois perpétrés par un particulier et il a dès lors pu obtenir gain de cause, n’y a-t-il pas quelque part un problème pour le citoyen qui n’est pas traité de manière égale ? Réfléchissons plus loin encore, n’y-a-t-il pas un standard minimum de protection concernant les droits fondamentaux qui reviennent à tout un chacun ? Une source bien connue est indispensable à ce stade, il s’agit de la Convention européenne des Droits de l’Homme. En effet, cette Convention garantit le droit de faire valoir ses contestations devant un tribunal indépendant et impartial, en son article 6.1. Dès lors, ce droit n’est-il pas bafoué lorsque l’on empêche un citoyen de faire entendre sa cause devant un tribunal établi par une loi ? Les immunités ne constituent-elles dès lors pas un avantage excessif ? La Convention européenne des Droits de l’Homme ne doit-elle pas l’emporter sur les avantages octroyés par les règles immunitaires ? Ces diverses interrogations, nous allons tenter d’y répondre dans ce présent travail. Pour ce faire, nous allons observer de nombreux arrêts, afin d’observer la conduite empruntée par la Cour européenne des Droits de l’Homme, mais aussi par la Cour Internationale de Justice et les juridictions nationales lorsque les immunités sont confrontées au droit d’accès au juge. Pour fournir une analyse des plus complètes, nous allons aborder différentes matières. En effet, nous aborderons des litiges en matières commerciales, comme des litiges relatifs à la violation d’une norme de jus cogens, en s’arrêtant également sur des litiges relatifs au droit du travail et en observant aussi ce qu’il advient en cas de dommages causés aux personnes. Pour produire une analyse des plus éclairées, nous allons débuter ce présent travail en revenant brièvement sur les notions d’immunités des Etats, en les définissant de manière précise, en s’arrêtant sur leur raison d’être, leur source et en observant leur champ d’application. Concernant le droit d’accès au juge, nous observerons la manière dont il est consacré par la Convention européenne des Droits de l’Homme et tenterons de déterminer les limites qui peuvent y être apportées. Enfin, nous aborderons les nouveaux litiges qui naissent de l’octroi des immunités, litiges opposant le requérant qui s’est vu débouté de son action et l’Etat qui a justement accordé les immunités à l’Etat défendeur. Nous observerons s’ils sont déjà possibles dans certains Etats, et comment mener l’action à bien. Pour finir, nous essayerons donc de répondre à toutes ces questions que la présente introduction a posées. Nous tenterons d’observer si l’une des deux normes en question doit prévaloir face à l’autre en observant comment toutes deux s’articulent entre elles. Nous observerons également si ces immunités, confrontées au droit au juge, constituent des avantages excessifs, ou si au contraire il s’agit d’avantages nécessaires.


Bibliographic reference |
Hick, Laurence. Immunités de l'Etat et droit d'accès au juge. Faculté de droit et de criminologie, Université catholique de Louvain, 2018. Prom. : Dopagne, Frédéric. |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:15956 |